Книжная полка Сохранить
Размер шрифта:
А
А
А
|  Шрифт:
Arial
Times
|  Интервал:
Стандартный
Средний
Большой
|  Цвет сайта:
Ц
Ц
Ц
Ц
Ц

Жерминаль

Покупка
Артикул: 061049.02.99
Доступ онлайн
350 ₽
В корзину
Роман «Жерминаль» известнейшего французского писателя Эмиля Золя (1840 - 1902) один из «документов эпохи» цикла «Ругон-Маркары», являющегося художественным воплощением «доктрины натурализма». В книге представлен неадаптированный сокращенный текст на языке оригинала.
Золя, Э. Жерминаль: книга для чтения на французском языке : художественная литература / Э. Золя. - Санкт-Петербург : Антология, КАРО, 2005. - 480 с. - ISBN 5-89815-503-1. - Текст : электронный. - URL: https://znanium.com/catalog/product/1048596 (дата обращения: 23.04.2024). – Режим доступа: по подписке.
Фрагмент текстового слоя документа размещен для индексирующих роботов. Для полноценной работы с документом, пожалуйста, перейдите в ридер.

                Emile Zola

                GERMINAL




Подготовка текста, примечания и словарь Л.В. Никулина




                ШСР©




Санкт-Петербург

2005

ББК 81.2Фр 3 81



По вопросам приобретения издания обращайтесь:
ООО «Антология трэйд»:
СПб (812) 326-0127; 326-0128; 323-7301 e-mail: sales@anthology.spb.ru Москва (095) 602-2340 e-mail: chimera_trade@mtu-net.ru
ООО «ИПЦ «КАРО»:
СПб (812) 320-8479; 317-9460 e-mail: karo@peterstar.ru Москва (095) 964-0846; 964-0210 e-mail: moscow@karo.net.ru




        Золя Э.
3 81 Жерминаль: Книга для чтения на французском языке. -СПб.: Антология, КАРО, 2005. - 480 с.
           ISBN 5-89815-503-1
           Роман «Жерминаль» известнейшего французского писателя Эмиля Золя (1840-1902) - один из «документов эпохи» - цикла «Ругон-Маркары», являющегося художественным воплощением «доктрины натурализма».
           В книге представлен неадаптированный сокращенный текст на языке оригинала.
ББК 81.2Фр

ISBN 5-89815-503-1

© Антология, 2005
© КАРО, 2005

            PREMIERE PARTIE






            I


   Dans la plaine rase, sous la nuit sans etoiles, d’une obscurite et d’une epaisseur d’encre, un homme suivait seul la grande route de Marchiennes a Montsou, dix kilometres de pave coupant tout droit, a travers les champs de betteraves. Devant lui, il ne voyait meme pas le sol noir, et il n’avait la sensation de l’immense horizon plat que par les souffles du vent de mars, des rafales larges comme sur une mer, glacees d’avoir balaye des lieues de marais et de terres nues. Aucune ombre d’arbre ne tachait le ciel, le pave se deroulait avec la rectitude d’une jetee, au milieu de l’embrun aveuglant des tenebres.
   L’homme etait parti de Marchiennes vers deux heures. Il marchait d’un pas allonge, grelottant sous le coton aminci de sa veste et de son pantalon de velours. Un petit paquet, noue dans un mouchoir a carreaux, le genait beaucoup; et il le serrait contre ses flancs, tantot d’un coude, tantot de l’autre, pour glisser au fond de ses poches les deux mains a la fois, des mains gourdes que les lanieres du vent d’est faisaient saigner. Une seule idee occupait sa tete vide d’ouvrier sans travail et sans gite, l’espoir que le froid serait moins vif apres le lever du jour. Depuis une heure, il avanfait ainsi, lorsque sur la gauche a deux kilometres de Montsou, il aperfut des feux rouges, trois brasiers brulant au plein air, et comme suspendus. D’abord, il hesita, pris de crainte; puis, il ne put resister au besoin douloureux de se chauffer un instant les mains.

3

Emile Zola

    Un chemin creux s’enfongait. Tout disparut. L’homme avait a droite une palissade, quelque mur de grosses planches fermant une voie ferree; tandis qu’un talus d’herbe s’elevait a gauche, surmonte de pignons confus, d’une vision de village aux toitures basses et uniformes.
    Il fit environ deux cents pas. Brusquement, a un coude du chemin, les feux reparurent pres de lui, sans qu’il compnt davantage comment ils brulaient si haut dans le ciel mort, pareils a des lunes fumeuses. Mais, au ras du sol, un autre spectacle venait de l’arreter. C’etait une masse lourde, un tas ecrase de constructions, d’ou se dressait la silhouette d’une cheminee d’usine; de rares lueurs sortaient des fenetres encrassees, cinq ou six lanternes tristes etaient pendues dehors, a des charpentes dont les bois noircis alignaient vaguement des profils de treteaux gigantesques; et, de cette apparition fantastique, noyee de nuit et de fumee, une seule voix montait, la respiration grosse et longue d’un echappement de vapeur, qu’on ne voyait point.
    Alors, l’homme reconnut une fosse. Il fut repris de honte: a quoi bon? il n’y aurait pas de travail. Au lieu de se diriger vers les batiments, il se risqua enfin a gravir le terri sur lequel brulaient les trois feux de houille, dans des corbeilles de fonte, pour eclairer et rechauffer la besogne. Les ouvriers de la coupe a terre avaient du travailler tard, on sortait encore les debris inutiles. Maintenant, il entendait les moulineurs pousser les trains sur les treteaux, il distinguait des ombres vivantes culbutant les berlines, pres de chaque feu.
    - Bonjour, dit-il en s’approchant d’une des corbeilles.
    Tournant le dos au brasier, le charretier etait debout, un vieillard vetu d’un tricot de laine violette, coiffe d’une casquette en poil de lapin; pendant que son cheval, un gros cheval jaune, attendait, dans une immobilite de pierre, qu’on eut vide les six berlines montees par lui. Le manoeuvre employe au culbuteur, un gaillard roux et efflanque,

4

ne se pressait guere, pesait sur le levier d’une main endormie. Et, la-haut, le vent redoublait, une bise glaciale, dont les grandes haleines regulieres passaient comme des coups de faux.
     - Bonjour, repondit le vieux.
     Un silence se fit. L’homme, qui se sentait regarde d’un oeil mefiant, dit son nom tout de suite.
     - Je me nomme Etienne Lantier, je suis machineur... Il n’y a pas de travail ici?
     Les flammes l’eclairaient, il devait avoir vingt et un ans, tres brun, joli homme, l’air fort malgre ses membres menus.
     Rassure, le charretier hochait la tete.
     - Du travail pour un machineur, non, non... Il s’en est encore presente deux hier. Il n’y a rien.
     Une rafale leur coupa la parole. Puis, Etienne demanda, en montrant le tas sombre des constructions, au pied du terri:
     - C’est une fosse, n’est-ce pas?
     Le vieux, cette fois, ne put repondre. Un violent acces de toux l’etranglait. Enfin, il cracha, et son crachat, sur le sol empourpre, laissa une tache noire.
     - Oui, une fosse, le Voreux... Tenez! le coron est tout pres.
     A son tour, de son bras tendu, il designait dans la nuit le village dont le jeune homme avait devine les toitures. Mais les six berlines etaient vides, il les suivit sans un claquement de fouet, les jambes raidies par des rhumatismes; tandis que le gros cheval jaune repartait tout seul, tirait pesamment entre les rails, sous une nouvelle bourrasque, qui lui herissait le poil.
     Le Voreux, a present, sortait du reve. Etienne, qui s’oubliait devant le brasier a chauffer ses pauvres mains saignantes, regardait, retrouvait chaque partie de la fosse, le hangar goudronne du criblage, le beffroi du puits, la vaste chambre de la machine d’extraction, la tourelle carree de la pompe d’epuisement. Cette fosse, tassee au fond d’un creux, avec ses constructions trapues de briques, dressant

Germinal

5

Emile Zola

sa cheminee comme une corne menagante, lui semblait avoir un air mauvais de bete goulue, accroupie la pour manger le monde. Tout en l’examinant, il songeait a lui, a son existence de vagabond, depuis huit jours qu’il cherchait une place; il se revoyait dans son atelier du chemin de fer, giflant son chef, chasse de Lille, chasse de partout; le samedi, il etait arrive a Marchiennes, ou l’on disait qu’il y avait du travail, aux Forges; et rien, ni aux Forges, ni chez Sonneville, il avait du passer le dimanche cache sous les bois d’un chantier de charronnage, dont le surveillant venait de l’expulser, a deux heures de la nuit. Rien, plus un sou, pas meme une croute: qu’allait-il faire ainsi par les chemins, sans but, ne sachant seulement ou s’abriter contre la bise? Oui, c’etait bien une fosse, les rares lanternes eclairaient le carreau, une porte brusquement ouverte lui avait permis d’entrevoir les foyers des generateurs, dans une clarte vive. Il s’expliquait jusqu’a l’echappement de la pompe, cette respiration grosse et longue, soufflant sans relache, qui etait comme l’haleine engorgee du monstre.
    Le manoeuvre du culbuteur, gonflant le dos, n’avait pas meme leve les yeux sur Etienne, et celui-ci allait ramasser son petit paquet tombe a terre, lorsqu’un acces de toux annonga le retour du charretier. Lentement, on le vit sortir de l’ombre, suivi du cheval jaune, qui montait six nouvelles berlines pleines.
    - Il y a des fabriques a Montsou? demanda le jeune homme.
    Le vieux cracha noir, puis repondit dans le vent:
    - Oh! ce ne sont pas les fabriques qui manquent. Fallait voir ga, il y a trois ou quatre ans! Tout ronflait, on ne pouvait trouver des hommes, jamais on n’avait tant gagne... Et voila qu’on se remet a se serrer le ventre. Une vraie pitie dans le pays, on renvoie le monde, les ateliers ferment les uns apres les autres... Ce n’est peut-etre pas la faute de l’empereur; mais pourquoi va-t-il se battre en Amerique? Sans compter que les betes meurent du cholera, comme les gens.

6

    Alors, en courtes phrases, 1’haleine coupee, tous deux continuerent a se plaindre. Etienne racontait ses courses inutiles depuis une semaine; il fallait donc crever de faim? bientot les routes seraient pleines de mendiants. Oui, disait le vieillard, fa finirait par mal tourner, car il n’etait pas Dieu permis de jeter tant de chretiens a la rue.
    - On n’a pas de la viande tous les jours.
    - Encore si l’on avait du pain!
    - C’est vrai, si l’on avait du pain seulement!
    Leurs voix se perdaient, des bourrasques emportaient les mots dans un hurlement melancolique.
    - Tenez! reprit tres haut le charretier en se tournant vers le midi, Montsou est la...
    Et, de sa main tendue de nouveau, il designa dans les tenebres des points invisibles, a mesure qu’il les nommait. La-bas, a Montsou, la sucrerie Fauvelle marchait encore, mais la sucrerie Hoton venait de reduire son personnel, il n’y avait guere que la minoterie Dutilleul et la corderie Bleuze pour les cables de mine, qui tinssent le coup. Puis, d’un geste large, il indiqua, au nord, toute une moitie de l’horizon: les ateliers de construction Sonneville n’avaient pas refu les deux tiers de leurs commandes habituelles; sur les trois hauts fourneaux des Forges de Marchiennes, deux seulement etaient allumes; enfin, a la verrerie Gagebois, une greve menafait, car on parlait d’une reduction de salaire.
    - Je sais, je sais, repetait le jeune homme a chaque indication. J’en viens.
    - Nous autres, fa va jusqu’a present, ajouta le charretier. Les fosses ont pourtant diminue leur extraction. Et regardez, en face, a la Victoire, il n’y a aussi que deux batteries de fours a coke qui flambent.
    Il cracha, il repartit derriere son cheval somnolent, apres l’avoir attele aux berlines vides.

Germinal

7

Emile Zola

    -      Vous etes peut-etre de la Belgique? reprit derriere Etienne le charretier, qui etait revenu.
    Cette fois, il n’amenait que trois berlines. On pouvait toujours culbuter celles-la: un accident arrive a la cage d’extraction, un ecrou casse, allait arreter le travail pendant un grand quart d’heure. En bas du terri, un silence s’etait fait, les moulineurs n’ebranlaient plus les treteaux d’un roulement prolonge. On entendait seulement sortir de la fosse le bruit lointain d’un marteau, tapant sur de la tole.
    -     Non, je suis du Midi, repondit le jeune homme.
    Le manoeuvre, apres avoir vide les berlines, s’etait assis a terre, heureux de l’accident; et il gardait sa sauvagerie muette, il avait simplement leve de gros yeux eteints sur le charretier, comme gene par tant de paroles. Ce dernier, en effet, n’en disait pas si long d’habitude. Il fallait que le visage de l’inconnu lui convint et qu’il fut pris d’une de ces demangeaisons de confidences, qui font parfois causer les vieilles gens tout seuls, a haute voix.
    -     Moi, dit-il, je suis de Montsou, je m’appelle Bonnemort.
    -     C’est un surnom? demanda Etienne etonne.
    Le vieux eut un ricanement d’aise, et montrant le Voreux:
    -      Oui, oui... On m’a retire trois fois de la-dedans en morceaux, une fois avec tout le poil roussi, une autre avec de la terre jusque dans le gesier, la troisieme avec le ventre gonfle d’eau comme une grenouille... Alors, quand ils ont vu que je ne voulais pas crever, ils m’ont appele Bonnemort, pour rire.
    Sa gaiete redoubla, un grincement de poulie mal graissee, qui finit par degenerer en un acces terrible de toux. La corbeille de feu, maintenant, eclairait en plein sa grosse tete, aux cheveux blancs et rares, a la face plate, d’une paleur livide, maculee de taches bleuatres. Il etait petit, le cou enorme, les mollets et les talons en dehors, avec de longs bras dont les mains carrees tombaient a ses genoux. Du reste, comme son cheval qui demeurait immobile sur les pieds, sans

8

paraitre souffrir du vent, il semblait en pierre, il n’avait l’air de se douter ni du froid ni des bourrasques sifflant a ses oreilles. Quand il eut tousse, la gorge arrachee par un raclement profond, il cracha au pied de la corbeille, et la terre noircit.
     Etienne le regardait, regardait le sol qu’il tachait de la sorte.
     - Il y a longtemps, reprit-il, que vous travaillez a la mine?
     Bonnemort ouvrit tout grands les deux bras.
     - Longtemps, ah! oui!... Je n’avais pas huit ans, lorsque je suis descendu, tenez! juste dans le Voreux, et j’en ai cinquante-huit, a cette heure. Calculez un peu... J’ai tout fait la-dedans, galibot d’abord, puis herscheur, quand j’ai eu la force de rouler, puis haveur pendant dix-huit ans. Ensuite, a cause de mes sacrees jambes, ils m’ont mis de la coupe a terre, remblayeur, raccommodeur, jusqu’au moment ou il leur a fallu me sortir du fond, parce que le medecin disait que j’allais y rester. Alors, il y a cinq annees de cela, ils m’ont fait charretier... Hein? c’est joli, cinquante ans de mine, dont quarante-cinq au fond!
     Tandis qu’il parlait, des morceaux de houille enflammes, qui, par moments, tombaient de la corbeille, allumaient sa face bleme d’un reflet sanglant.
     - Ils me disent de me reposer, continua-t-il. Moi, je ne veux pas, ils me croient trop bete!... J’irai bien deux annees, jusqu’a ma soixantaine, pour avoir la pension de cent quatre-vingts francs. Si je leur souhaitais le bonsoir aujourd’hui, ils m’accorderaient tout de suite celle de cent cinquante. Ils sont malins, les bougres!... D’ailleurs, je suis solide, a part les jambes. C’est, voyez-vous, l’eau qui m’est entree sous la peau, a force d’etre arrose dans les tailles. Il y a des jours ou je ne peux pas remuer une patte sans crier.
     Une crise de toux l’interrompit encore.
     - Et fa vous fait tousser aussi? dit Etienne.
     Mais il repondit non de la tete, violemment. Puis, quand il put parler:

Germinal

9

Emile Zola

     - Non, non, je me suis enrhume, l’autre mois. Jamais je ne toussais, a presentje ne peux plus me debarrasser... Et le drole, c’est que je crache, c’est que je crache...
     Un raclement monta de sa gorge, il cracha noir.
     - Est-ce que c’est du sang? demanda Etienne, osant enfin le questionner.
     Lentement, Bonnemort s’essuyait la bouche d’un revers de main.
     - C’est du charbon... J’en ai dans la carcasse de quoi me chauffer jusqu’a la fin de mes jours. Et voila cinq ans que je ne remets pas les pieds au fond. J’avais fa en magasin, parait-il, sans meme m’en douter. Bah! fa conserve!
     Il y eut un silence, le marteau lointain battait a coups reguliers dans la fosse, le vent passait avec sa plainte, comme un cri de faim et de lassitude venu des profondeurs de la nuit. Devant les flammes qui s’effaraient, le vieux continuait plus bas, remachant des souvenirs. Ah! bien sur, ce n’etait pas d’hier que lui et les siens tapaient a la veine! La famille travaillait pour la Compagnie des mines de Montsou, depuis la creation; et cela datait de loin, il y avait deja cent six ans. Son aieul, Guillaume Maheu, un gamin de quinze ans alors, avait trouve le charbon gras a Requillart, la premiere fosse de la Compagnie, une vieille fosse aujourd’hui abandonnee, la-bas, pres de la sucrerie Fauvelle. Tout le pays le savait, a preuve que la veine decouverte s’appelait la veine Guillaume, du prenom de son grand-pere. Il ne l’avait pas connu, un gros a ce qu’on racontait, tres fort, mort de vieillesse a soixante ans. Puis, son pere, Nicolas Maheu dit le Rouge, age de quarante ans a peine, etait reste dans le Voreux, que l’on fonfait en ce temps-la: un eboulement, un aplatissement complet, le sang bu et les os avales par les roches. Deux de ses oncles et ses trois freres, plus tard, y avaient aussi laisse leur peau. Lui, Vincent Maheu, qui en etait sorti a peu pres entier, les jambes mal d’aplomb seulement, passait pour un malin. Quoi faire, d’ailleurs? Il fallait

10

Доступ онлайн
350 ₽
В корзину